Comment faire une demande de changement de destination d'un local commercial ?

Au cours de la vie d’un local commercial, plusieurs activités pourront y être exercées au fur et à mesure. Cependant, ces changements d’activité ne sont pas sans conséquences. Dans certains cas, il va falloir faire ce qu’on appelle un “changement de destination” pour adapter le local à la nouvelle activité.

Comment faire ce changement ? Il faut suivre une procédure particulière avec notamment l’obtention d’une autorisation d’urbanisme et la modification de votre bail commercial si vous êtes locataire.

En effet, le changement de destination nécessite parfois, une demande de permis de construire ou une déclaration préalable de travaux. Le type de demande dépendra de  l’ampleur des travaux à réaliser dans le local pour exercer la nouvelle activité dans les règles de l’art 🎨.

Attention à ne pas confondre changement d’usage et changement de destination. Même si les deux procédures peuvent être liées, ce sont deux notions distinctes !  On vous explique leurs différences et comment procéder pour modifier la destination de votre local commercial en cas de changement d’activité.

Usage et destination, quelle différence ?

L’usage et la destination d’un bien immobilier sont souvent confondus, on vous explique la différence pour ne pas vous louper !

L’usage du local

→ Selon le code de la construction et de l’habitation (CCH), l’usage correspond à ce pour quoi un bâtiment est utilisé. Il existe deux catégories :

• l’habitation (article L631-7 du code de la construction et de l’habitation). ;
• les autres locaux qui ne sont pas à usage d’habitation (exemple :  tous les types de locaux affectés à un usage professionnel).
  
  

Chaque bâtiment est donc affecté à un usage mais il est possible de le modifier.

Par exemple, vous pouvez tout à fait transformer un local commercial en habitation 🏡, ou inversement, transformer un logement (comme une résidence secondaire) en local commercial pour y exercer une activité. Il existe aussi les locaux à usage mixte : il s’agit d’une résidence principale où l’occupant exerce son activité professionnelle.

Mais attention ! Vous ne pouvez pas faire un changement d’usage n’importe comment 😉

Une procédure de changement d’usage doit être respectée dans les communes de plus de 200 000 habitants et celles situées dans les départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne.

C’est le service de l’urbanisme qui se charge d’approuver votre demande de transformation. Cette demande est généralement accordée que pour l’occupant actuel du local commercial et pas pour les prochains preneurs, sauf demande de changement d’usage définitif.

À noter : Si vous souhaitez faire une demande de changement d’usage à titre définitif, il faudra faire ce qu’on appelle une compensation. Vous allez voir, cela ressemble un peu au troc ! 😉

🕵️‍♀️ Exemple : À Paris, les autorisations de changement d’usage pour transformer définitivement un local d’habitation en local professionnel ou commercial requière une compensation, c’est-à-dire la transformation d’un autre local qui n’est pas à usage d’habitation en logement. En pratique, vous devez proposer un autre bien dont vous êtes propriétaire qui n’est pas à usage d’habitation pour un changement d’usage en habitation. Vous avez également la possibilité d’acheter un titre de compensation à un autre propriétaire.  

La destination du local

La destination d’un bâtiment est la raison pour laquelle il a été construit : en bref, son affectation. Par exemple : un commerce, une habitation…. Il existe cinq destinations, divisées en sous-destinations (article R151-27 du code de l’urbanisme et arrêté du 10 novembre 2016)

Tableau des destinations et sous-destinations

Le changement de destination ou de sous-destination consiste de ce fait à modifier l’affectation du local. C’est le cas par exemple quand on transforme un commerce en bureau. Pour cela, vous devez déposer une demande d’autorisation au service de l’urbanisme.

Par exemple, si vous souhaitez exercer une activité de location saisonnière dans votre local, vous devez d’abord demander un changement de destination.

Quelles sont les démarches pour un changement de destination d’un local commercial ?

Lorsque vous souhaitez changer la destination de votre local commercial, vous devez :

1-  Vérifier le  règlement de copropriété (s’il se situe dans une copropriété) pour vérifier qu’il n’existe pas d’interdiction de changement de destination du local. En effet, dans certains cas il existe une clause sur la destination de l’immeuble. Celle-ci peut autoriser ou interdire certaines activités, voire interdire les changements d’affectation des locaux. Selon le cas, il vous faudra demander ou non l’autorisation de l’assemblée générale des copropriétaires pour pouvoir changer la destination de votre local et effectuer les travaux nécessaires 🔨.

2- Vérifier que le projet est conforme au Plan local d’urbanisme (PLU). Celui-ci peut contenir des règles contraignantes comme le fait d’interdire la transformation d’un local commercial en logement. Vous pouvez consulter le PLU en mairie.

3-  Ensuite déposer une demande au service d’urbanisme de la mairie où se situe le local.

4 - À noter : Pour pouvoir effectuer un changement d’utilisation, vous devez aussi déposer auprès de votre mairie une déclaration préalable de travaux ou une demande de permis de construire selon l’étendue des travaux à réaliser :

• un permis de construire pour un changement de destination (ou sous-destination) avec modification des façades ou de la structure porteuse ;
• une déclaration préalable de travaux dans les autres cas (par exemple cas d’un aménagement et d’un rafraîchissement intérieur).

Depuis le 1er janvier 2022 votre demande d’autorisation d’urbanisme peut être déposée en ligne 👩‍💻, par lettre recommandée avec accusé de réception ✉️ ou sur place 🏫 auprès de la mairie de la commune dans laquelle le local se situe. Certaines assurent également l’instruction des dossiers en ligne.

Vous souhaitez refaire l’intérieur d’un local commercial ? Cet article est pour vous : « Faut-il une déclaration de travaux pour refaire l’intérieur d’un local commercial ? »

Bon à savoir : Si votre local commercial fait plus de 150 m2 de surface plancher, vous êtes dans l’obligation de recourir à un architecte.

Que se passe-t-il après votre demande ? 👀

Suite à votre déclaration, vous obtenez un numéro d’enregistrement et un récépissé. La mairie a alors un mois pour revenir vers vous dans le cadre d’une déclaration préalable de travaux et comptez trois mois pour l’obtention d’un permis de construire.

Par ailleurs, n’oubliez pas d’informer l’administration fiscale du changement de destination ! Vous disposez d’un délai de trois mois à compter du changement de destination pour faire le nécessaire. L’administration pourra ainsi mettre à jour la valeur locative cadastrale de votre local.

Lisez notre article « Comment calculer la taxe foncière d’un local professionnel ? » pour en savoir plus sur le calcul de votre valeur locative.

Un locataire peut-il changer la destination d’un local commercial ?

Vous êtes locataire d’un local commercial et vous avez l’intention de changer sa destination ? Vous devez impérativement obtenir l’autorisation de votre propriétaire-bailleur ! Vous ferez les démarches mentionnées plus haut avec lui et devrez respecter une procédure de déspécialisation de votre bail commercial. Hein ? 🧐 Il s’agit d’une procédure pour modifier l’utilisation du local mentionnée dans votre bail.

En effet, votre contrat de location comprend une clause de destination dans laquelle est mentionnée l’activité que vous pouvez exercer dans le local. Cette destination doit être autorisée par le règlement de copropriété (si vous êtes en copro) et par l’usage des locaux. La clause peut n’autoriser qu’une seule activité ou être plus large et englober différentes activités, ou carrément autoriser « tous commerces » dans le local.

Attention 💡

Si le bail prévoit une destination multiple, il faut veiller à une rédaction précise de la clause pour savoir si toutes les activités doivent être exercées par le preneur ou s’il peut en exercer qu’une seule. En l’absence de précision et en cas de problème, les juges considèrent que le preneur n’est pas tenu de tout exercer.

🕵️‍♀️Par exemple :  Lorsqu’un preneur ouvre une boulangerie, sa clause de destination dans le bail peut prévoir plusieurs activités : boulangerie pâtisserie, sandwicherie, rôtisserie, pizzas, et autres plats à emporter, salon de thé et de consommation sur place… Dans ce cas, il peut être autorisé à n’exercer qu’une seule des activités mentionnées ou à devoir toutes les exercer selon la rédaction du bail. En l’absence de précision, s’il le souhaite, il peut juste exercer l’activité de boulangerie, sans exercer les autres activités mentionnées.

Le non-respect de la clause de destination est une infraction au bail, le preneur risque :

• la résiliation du bail ;
• le refus du renouvellement du bail sans indemnité d’éviction ;
• le versement d’une indemnisation au bailleur et à des tiers en cas de préjudice.
  

Pour plus d’informations sur le bail commercial 👉 « Bail commercial : les fondamentaux - Appliquer la réglementation des baux commerciaux ».

La procédure de déspécialisation pour modifier l’activité autorisée dans le bail

En pratique, comment modifier l’activité qui sera exercée dans le local ? 👉 Tout dépend du type de changement d’activité (déspécialisation). Est-ce que vous souhaitez exercer une activité complémentaire ou tout bonnement modifier radicalement votre activité ?

En fonction du changement, il existe deux procédures de déspécialisation :

• la déspécialisation partielle qui permet d’ajouter des activités connexes ou complémentaires à l’activité prévue dans le bail ;
• la déspécialisation plénière ou totale qui permet de modifier totalement l’activité initiale.

La déspécialisation partielle

Le locataire peut « adjoindre à l’activité prévue au bail des activités connexes ou complémentaires » (article L145-47 du code de commerce). Mais quelles sont ces activités ? Aucune définition légale n’existe 🙁 . Et oui la loi ne prévoit pas toujours tout ! Mais heureusement, au fur et à mesure des conflits entre propriétaires et locataires, les juges ont donné leur définition 😮‍💨 :

• une activité connexe est une activité qui a un rapport étroit avec celle prévue dans le bail ;
• une activité complémentaire est une activité nécessaire pour un meilleur exercice de l’activité initiale.

🕵️‍♀️Exemple : Pour un cordonnier, une activité connexe ou complémentaire serait la reproduction de clés ou encore la vente de chaussures.

Il doit donc y avoir une similitude ou une dépendance des activités.

Attention :

👉 Il n’est pas possible d’interdire la possibilité de faire une déspécialisation partielle. S’il existe une telle clause dans le bail, les juges vont l’écarter.

👉 Vous ne pouvez pas ajouter une activité connexe ou complémentaire et ne plus exercer l’ancienne !

Quelle est la procédure à suivre ? Vous devez informer votre propriétaire par acte extrajudiciaire (par voie de commissaire de justice) ou par lettre recommandée avec accusé de réception indiquant les activités envisagées. Le propriétaire dispose alors d’un délai de deux mois pour faire savoir s’il conteste le caractère connexe ou complémentaire des activités.

En cas de contestation, ce sera un juge du tribunal judiciaire qui appréciera la connexité ou la complémentarité au regard notamment de la modification des usages dans le secteur.

En cas d’acceptation du propriétaire, il pourra augmenter le loyer lors de la première révision triennale suivant la modification, mais seulement si la valeur locative du local a été modifiée en raison des nouvelles activités.

🕵️‍♀️Exemple :  si le bail commercial a été conclu le 1er décembre 2021 et que le locataire a eu recours à une déspécialisation partielle le 1er décembre 2022, le bailleur ne pourra augmenter le loyer que lors de la première révision triennale; c’est-à-dire à partir du 30 novembre 2024.

Attention : Lors du renouvellement, la déspécialisation constitue une cause de déplafonnement du loyer : la fixation du loyer renouvelé pourra être fixée à la valeur locative.

Bon à savoir

L’ajout d’une activité connexe ou complémentaire ne nécessite généralement pas une déclaration de changement de destination en mairie.

La déspécialisation plénière

La déspécialisation plénière concerne le preneur qui souhaite exercer une ou plusieurs activités différentes de celles prévues dans le bail. Attention, cette déspécialisation dépend de la conjoncture économique de l’activité du bail (article L145-48 du code de commerce).

Qu’est-ce que cela veut dire ? Cette déspécialisation dépend d’une condition économique : par exemple en cas de crise économique du secteur ou si l’activité ne correspond plus aux besoins de la clientèle.

Pour obtenir une déspécialisation totale, vous avez l’obligation de faire une demande par acte extrajudiciaire ou par lettre recommandée avec accusé de réception à votre bailleur. Elle doit indiquer les activités dont l’exercice est envisagé. Vous devez également avertir les créanciers inscrits sur le fonds de commerce (= ceux qui ont un privilège ou un nantissement sur le fonds).

Dans le mois de la demande, le bailleur doit aviser ses locataires avec lesquels il a conclu une clause de non-concurrence, c’est-à-dire ceux qui ont une activité similaire à celle visée dans la demande de déspécialisation. Ceux-ci ont un mois pour répondre.

Concernant la déspécialisation demandée, le bailleur dispose de trois mois pour 🙅‍♂️ refuser, 👍 accepter ou donner ses conditions. À défaut, il sera réputé avoir accepté la demande.

En cas de refus, le bailleur aura l’obligation de motiver son refus à l’aide de motifs graves et légitimes.

En cas d’acceptation, il pourra demander une modification de loyer au jour de la transformation de l’activité.

Bon à savoir

Le changement d’activité doit faire l’objet d’une demande de changement de destination en mairie lorsque la destination ou la sous-destination du local est modifiée.

Conclusion

Le changement de destination de votre local commercial nécessite de déposer une demande auprès de votre mairie : une déclaration préalable de travaux ou un permis de construire. Par ailleurs, la plupart du temps, si le local est mis en location, le preneur devra suivre une procédure de déspécialisation pour modifier l’activité mentionnée dans la clause de destination du bail commercial.